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Quelque part entre Rose Kennedy et La Superbe de Benjamin Biolay
9 septembre 2014

ô mon amour c'est pire que si j'étais sans joie...

 

Le soleil attendra un peu...

 

 

images (16)

 

 

 

Vengeance est un album fort complexe ; en même temps, B.BIOLAY nous a toujours entraînés très loin des sentiers battus et avec lui, on peut aussi bien sombrer dans les Tartares qu’atteindre la canopée. Cet album est indéfinissable et on ne sait pas toujours où l’on va mettre les pieds. Ici est évoqué l’amour, le temps qui passe, la séparation, la solitude, sujets traités dans les albums précédents mais quelque chose de nouveau va venir se greffer sur les thèmes classiques. Ce qui est original c’est une volonté de vivre, et surtout une volonté de s’échapper du souvenir plus ou moins juste d’un amour idéal, d’une femme rêvée ; parfois, le sujet ne cherche plus à cultiver le bonheur perdu. Peut-on dire que c’est un album qui apprendrait à vivre, à retenir le meilleur, à ne pas ternir par anticipation la relation, à ne pas l’auto mutiler parce qu’on a peur de la chute ? Sans doute mais il faut cependant apporter des nuances…

Ici, les sujets ne sont plus sous le joug d’une déraison liée à la passion, déraison qui aurait pu pousser les individus déjà fort menaçants de Même si tu pars, Dans ta bouche, Jaloux de tout, Tu es mon amour à l’idée de meurtre, voire au meurtre même comme dans Dernier souper au château. Ici la plupart des textes évoquent l’amour et le désir d’aimer mais on note une volonté de s’écarter, de s’échapper d’un dérèglement qui enfermerait les individus dans une folie, une aliénation d’eux-mêmes : « puisqu’on ne peut pas reprendre à Z il faut qu’on m’aide », « c’est le cours de la vie », « le soleil est là ». Néanmoins, dans Marlène, on se retrouve dans un schéma différent proche de l’érotique courtois où selon Denis de Rougemont, le désir grandirait sous le poids des obstacles. Quel étrange amour avec de nouvelles donnes, une nouvelle carte loin de toute morale…C’est un sentiment indicible « comme tu ne l’imagines pas », non reconnu à sa juste valeur et cet amour unique, si particulier va entraîner le sujet dans un désert intérieur ; par contre, une chose est sûre, il ne se laisse pas prendre d’assaut par une jalousie dégoulinante ! Là, le désir se décline en termes d’opposition et ces deux êtres différents ne semblent pas du tout complémentaires ; ils sont même incompatibles. Ils évoluent dans deux univers opposés et aucune jonction n’est possible. Il sacralise l’amour, elle le désacralise; il est fidèle, elle est frivole ; il est inquiet, elle est inquiétante. Leurs attitudes sont mises en parallèle et se contrarient : «je t’aime… tu m’aimes mais… » Comme dans Manon Lescaut, leurs principes s’opposent. Mi-femme, mi-démon, mais qui est cette Marlène ? Étymologiquement, le prénom Marlène vient de Magdala (aujourd’hui Medjel – de l’hébreu migdal, « tour »), au nord de Tibériade ; Magdala était le village d’où venait Marie la Magdaléenne, autrement dit Marie-Madeleine, la célèbre prostituée qui, repentie, fut une disciple assez fervente de Jésus pour être la première à le voir et lui parler après sa résurrection. (Signification et origine du prénom Marlène - Magicmaman.com) Dans ELLE, rubrique-Marlène et les hommes- j'ai lu que ses relations amoureuses sont souvent tourmentées, qu’elle a du mal à accepter les compromis qui sont nécessaire à l’harmonie du couple ! Ici, Marlène semble incapable de distinguer le bien du mal. Elle est sincère et changeante, perfide et charmante ; elle est vraie dans une certaine immoralité. C’est un être complexe, ce qui fait qu’elle demeure attachante pour le sujet et même pour nous. Sur cet homme, elle exerce un pouvoir total ; il en a pleinement conscience mais il ne peut se délivrer de ses charmes. Elle manifeste un goût pour la liberté, se laisse aller au gré de ses fantaisies et toutefois, elle demeure à ses côtés. Serait-elle un prénom possible à notre Chère Inconnue ? Une fille de toutes les joies ? Un mythe de la femme fatale ? On dirait bien en tout cas qu’elle lui a jeté un sortilège ; il devient un homme « lige » dévoué à sa déesse et totalement sous son emprise. Le présent s'organise dans un huit-clos. Cet amour reflète une vision pessimiste et absurde de l’existence du sujet : « moi j’en saigne, moi j’en crève ». Prisonnier de ce sentiment, il vit un échec mais il n’arrive pas à rompre ; sa souffrance n’a pas de nom car elle n’a sans doute pas d’antécédent ; elle est à la hauteur de son sentiment. Marlène ne peut pas comprendre, elle ne s'interroge pas sur l'amour, il lui est impossible de rendre des comptes; elle papillonne et pourtant il la perçoit comme une idole, une sainte « je t’aime comme tu ne l’imagines pas » : ce qui rend l’homme pathétique car les actions de la femme sont en contraste avec l’image qu’il a d’elle. Il est prêt à tout, même à souffrir pire qu’en martyr : « Ô mon amour c’est pire que si j’étais sans joie…que si j’étais en détresse. » C’est un homme déchu. La situation est insupportable mais il est incapable de s'en aller; il est dépendant. La chambre, symbole de l’intimité, de l’union devient une prison dans laquelle il ne pourra jamais être heureux et d’où il ne pourra jamais s’échapper car être loin de ce lieu, c’est se jeter dans le néant. Cet amour est dépourvu de cohérence. Marlène, quant à elle, est une claustrophobe de l'amour et elle ne peut pas toujours séjourner dans de mêmes bras. Elle est insouciante et pour elle la situation est normale. Il demeure complètement dépendant d’elle et se résigne à être malheureux. Le texte finit sur l'écartèlement entre l'amour affectif et l'érotisme: « avant que nos corps se figent, écarte tiges et compas » ; l’harmonie des corps doit l’emporter sur celle des cœurs ! 

En Occident, il est reconnu que dans le monde de la littérature les hommes ont toujours courtisé des femmes cruelles et se sont soumis, docilement, à elles !

A très bientôt…

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Quelque part entre Rose Kennedy et La Superbe de Benjamin Biolay
  • Blog: A la découverte de l'univers poétique de Benjamin BIOLAY. Explications au gré des imaginations, envolées lyriques sur les grands thèmes, humble hommage à la richesse de ses écrits et autres pérégrinations fantaisistes...
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