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Quelque part entre Rose Kennedy et La Superbe de Benjamin Biolay
29 juin 2011

A l'origine et autres temps...

 

A mesure que le temps passe

Je mesure le temps qui passe

Et tandis que l’eau s’étend

Jusqu’à l’autre bout de l’étang

Le temps qui passe a fait couler beaucoup d’encre et des torrents de larmes. Tous les grands auteurs ont voulu saisir l’inexorable fuite du temps. Le temps s’en va, le temps s’en va… (Ronsard « Sonnet à Marie »). L’instant de ce vers du XVIème siècle, nous pouvons gagner l’illusion, illusion provisoire, que c’est juste le temps qui va, tandis que nous, non. Le temps qui passe a été ressenti différemment selon les époques : comme une nostalgie chez les romantiques, comme l’ « Ennemi » chez les « maudits », et Proust nous a montré que l’homme pouvait le vaincre. En général, ce sombre constat des aiguilles qui trottinent sans talons nous assène un sacré coup au moral ; le temps demeure et demeurera encore et encore notre plus sensible talon d’Achille. Oui la hantise du temps qui passe est un lieu commun lyrique et B.Biolay l’a exploitée à son tour dans de nombreuses chansons; il l’a explorée de façon toute personnelle. Aussi, il a su en renouveler l’expression.

Pour cette deuxième semaine avec vous, j’aborderai la perception du temps dans les albums de Rose Kennedy à La Superbe. Notre voyage temporel débutera par A l’ origine…

Ne cherchez pas à nier ; je pressens que certains commencent déjà à s’égarer dans leurs souvenirs issus de l’incroyable tournée de B.Biolay. Je crois que nous avons tous été saisis par cette interprétation aussi magnifique que troublante. Le seul aspect négatif, c’est que la chanson laissait planer le pressentiment que le concert allait bientôt s’achever. J’ignorais que B.B. était doté d’une cage thoracique aussi volumineuse ! Je note de grandes performances en tant que chanteur ; il regorge de surprises. Pour ceux qui n’auraient pas assisté à ce moment, je ne saurais trop leur conseiller de visionner le Live, si ce n’est déjà fait.

Lorsque j’ai découvert la chanson éponyme de l’album (il y a déjà un certain nombre d’années), je m’attendais, d’après le titre, à trouver l’évocation d’un moment magnifié, d’un âge d’or perdu : une sorte d’évocation d’un jardin d’Eden abandonné quelque part dans un passé. Et bien non. D’ailleurs, elle n’évoque pas non plus un futur magnifié comme était traitée l’origine au Moyen Age où l’âge d’or répondait à un avenir idyllique. Ici, dans le texte, je ne perçois pas de félicité originelle mais une période ni bonne, ni mauvaise qui serait toutefois susceptible d’avoir conduit au pire de l’après : le massacre de Colombine en 1999, les attentats du 11 septembre 2001. Aucun regret d’une époque révolue  n’est à déplorer; elle ne paraît pas très éloignée cette période avec son semblant d’harmonie. Elle couvre les années 80 et 90. Les choses ensuite n’ont pu que se dégrader : violence, argent, religion, armes. Bref, le progrès s’est heurté à un mythe plus passéiste. Je ne sais pas / Si nous étions les mêmes/ Les mêmes en pire/ Comment ça va finir. Ce que je soulignerais avant tout, c’est  cette ironie dans le traitement de ce bon vieux mythe : A l’ origine les poules étaient des nuggets(…)/ Les speakerines/ Faisaient encore des massages… Ni cliché édénique, ni narration d’un passé idyllique (La Pénombres des Pays Bas) ou d’un futur prometteur (Les cerfs-volants), rien, non rien de tout cela et cette mémoire à l’âge d’or est plutôt caustique et nous met en face d’un âge de bronze. La version des concerts nous inspire une vision plus apocalyptique que celle suggérée dans l’album et désormais, l’impression qu’elle me donne est celle de l’  « eschatologie cosmique »: je conçois que ces mots seraient difficiles à fredonner dans une chanson. Ils renvoient à tout ce qui pourrait conduire à la fin des temps, au jugement dernier. Les prophéties traditionnelles hindoues annoncent que le monde des mortels glissera dans le chaos et la ruine. La violence, la perversité, la convoitise, le désir de possession surgiront. Cette chanson fait écho en un sens à  la montée de l’eschatologie humaine (la fin des sociétés humaines), voire de l’eschatologie cosmique (la fin du monde). Pour les chrétiens, il manquerait l’eschatologie personnelle (la mort des individus et la vie après la mort).

Je vous donne rendez-vous ce week-end pour parler du temps passé ; je vous quitte sur ces quelques lignes :

Lentement mais sûrement

On décline outrageusement

Forcément, oui forcément

On prend son temps

On pense au temps d’avant

Sous le feu du firmament

Qui nous marque au fer blanc

Hors la vie (Négatif).

 

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